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La violence des gangs en Haïti continue d’avoir un impact dévastateur sur la population, comme le constate un nouveau rapport des Nations Unies sur les violations des droits humains enregistrées dans ce pays au cours du quatrième trimestre de l’année 2024.

Entre le 1er octobre et le 31 décembre 2024, selon les données du Bureau intégré des Nations Unies en Haïti (BINUH), au moins 1.732 personnes ont été tuées et 411 ont été blessées dans le cadre de violences perpétrées par des gangs et groupes d’autodéfense, ainsi que lors d’opérations de la police nationale.

Créé en 2019 et basé dans la capitale haïtienne, le BINUH a notamment pour mandat de défendre et promouvoir les droits de l’homme dans le pays. 

Au total, sur l’ensemble de l’année 2024, le rapport fait état de 5.626 personnes tuées et 2.213 blessés en Haïti.

Enlèvements contre rançon

Parallèlement, au moins 431 personnes ont été enlevées contre rançon par des gangs au cours du dernier trimestre, portant le nombre total d’enlèvements à 1.494 en 2024.

Le quatrième trimestre a été marqué par trois massacres, qui ont causé plus de 300 morts, dans le quartier de Wharf Jérémie (commune de Port-au-Prince), ainsi que dans la localité de Pont Sondé (commune de Saint Marc) et dans la commune de Petite Rivière de l’Artibonite, dans le département de l’Artibonite.

Il a aussi été marqué par une consolidation du phénomène de « justice populaire » comme une source importante d’abus des droits de l’homme. Au cours de la période considérée, au moins 268 personnes ont été lynchées ou exécutées dans ces circonstances, soit plus de 596 en 2024.

Jeunes femmes soutenues par le projet « Espas mwen », qui soutient les femmes et les filles contre la violence liée au sexe, lancé par l'UNICEF sur le site de déplacement de l'école Jean Marie Césard, à Port-au-Prince.
© UNICEF/UNI701782/Jean
Jeunes femmes soutenues par le projet « Espas mwen », qui soutient les femmes et les filles contre la violence liée au sexe, lancé par l’UNICEF sur le site de déplacement de l’école Jean Marie Césard, à Port-au-Prince.

Violences sexuelles

Le rapport du BINUH s’inquiète que les membres de gangs aient continué à violer et exploiter sexuellement des femmes et des jeunes filles, mais aussi à recruter de jeunes garçons afin de renforcer leur contrôle sur les populations.

Ces gangs continuent également de contrôler la liberté de circulation des personnes et des véhicules sur les principales voies d’accès à la capitale, mais aussi d’attaquer et de saccager des bâtiments publics et privés, y compris des écoles et des hôpitaux.

Le rapport souligne aussi le nombre élevé de personnes tuées lors d’opérations de maintien de l’ordre contre les gangs, soit au moins 771 personnes tuées ou blessées au cours du quatrième trimestre. Près de 40% des victimes sont des résidents, souvent fauchés par des balles perdues dans la rue ou à leur domicile.

Exécutions sommaires

À cela s’ajoutent des exécutions sommaires qui auraient été commises par des éléments de la police. Au moins 80 personnes auraient trouvé la mort dans ces circonstances au cours du quatrième trimestre, pour un total de 281 sur l’ensemble de l’année 2024.

Parmi les victimes figurent des individus accusés d’être affiliés aux gangs, mais aussi des chauffeurs de mototaxi et des vendeurs ambulants, qui n’ont pas été capables de fournir une pièce d’identité ou de justifier leur présence dans certains quartiers au moment de leur arrestation.

Conditions de détention dans les prisons

Le rapport rappelle également que les conditions de détention dans les prisons en Haïti sont toujours dégradantes et inhumaines. Elles ont causé la mort de 21 détenus au cours de la période considérée, soit un total de 186 en 2024.

Face à ces abus et violations des droits de l’homme, le BINUH estime que des actions timides ont été entreprises par les autorités pour lutter contre l’impunité dont bénéficient les auteurs.

Plusieurs actions judiciaires ont ainsi été ouvertes pour faire reculer la corruption. En revanche, suite aux massacres de Wharf Jérémie et Pont Sondé, les enquêtes policières initiées n’ont donné lieu à aucun acte de la part des autorités judiciaires en 2024.

De même, pour les exécutions sommaires qui impliqueraient des éléments de la police, l’Inspection générale de la police n’a pris quasiment aucune mesure pour identifier leurs auteurs, en raison de l’insécurité. À cet égard, le rapport rappelle que depuis le début du processus de vérification (vetting) au sein de la police, en juin 2023, aucun policier n’a fait l’objet d’une enquête d’antécédents approfondie.

Source: news.un.org