Bien que les femmes aient apporté des contributions extraordinaires à la civilisation islamique, elles sont encore laissées pour compte dans de nombreux pays, a déclaré la Vice-Secrétaire générale de l’ONU, Amina Mohammed, lors d’un discours prononcé lundi en Arabie saoudite.
S’adressant à une conférence internationale à Jeddah sur les droits et le rôle des femmes dans l’Islam, elle a appelé à une action dans les domaines de l’éducation, de l’émancipation économique et de la paix.
Mettre fin au conflit Israël-Gaza
Face à « la catastrophe humaine qui se déroule en Israël et à Gaza », elle a réitéré la condamnation par le Secrétaire général du meurtre de civils et de la prise d’otages, ainsi que son appel à leur libération inconditionnelle, à un cessez-le-feu humanitaire et à un accès sans entrave aux personnes dans le besoin.
« Nous devons tous, dans cette région et dans le monde, faire tout ce qui est en notre pouvoir pour mettre fin à cette horrible violence, à cette douleur et à cette souffrance et revenir à la table de la paix, mais peut-être cette fois-ci avec des femmes », a-t-elle dit. « Notre foi musulmane exige de nous que nous prenions soin de nos voisins en cas de besoin ».
Un monde qui laisse tomber les femmes
Mme Mohammed s’est dite honorée de participer à la discussion « sur la manière dont nous pouvons revenir à la vision originale et magnifique de l’islam, qui consiste à mesurer une personne non pas en fonction de son sexe, mais de la force de ses croyances et de la vertu de ses actes ».
Elle a rappelé que, dès le départ, l’islam a reconnu le droit des femmes à participer à la prise de décision politique, à hériter et à posséder des biens et des entreprises, « et pourtant, plusieurs siècles plus tard, dans de nombreux pays et dans de nombreux domaines de la vie, les femmes sont restées à la traîne ».
La numéro deux de l’ONU a déclaré que c’était « une triste réalité historique » que les femmes et les filles souffrent souvent en premier et le plus durement, mais que tout le monde en paie le prix, car les sociétés sont moins pacifiques, les économies moins prospères et le monde moins juste.
« Aujourd’hui, les femmes sont laissées pour compte dans le monde entier. Nos mères, nos épouses, nos filles », a déclaré Mme Mohammed.
« Les anciennes formes de discrimination, de violence et d’abus à l’encontre des filles s’aggravent partout, tandis que de nouvelles formes de préjugés sexistes et d’inégalité sont souvent intégrées dans les algorithmes de la nouvelle ère du monde numérique », a-t-elle ajouté.
Redresser les torts
Mme Mohammed a appelé à une action solidaire sur trois fronts « pour redresser les torts ».
Elle a déclaré qu’il fallait faire davantage pour garantir le droit à l’éducation pour tous, en particulier pour les femmes et les filles, « parce que le Saint Coran l’exige de nous ».
Toutefois, elle a souligné que l’éducation « doit être définie par un processus inclusif, progressif et respectueux des normes sociétales, religieuses et culturelles qui ne font pas de mal, mais donnent un pouvoir et une dignité à toutes les personnes ».
Situation urgente en Afghanistan
L’Islam appelle clairement à mettre fin à toutes les lois et pratiques discriminatoires qui entravent l’accès à l’éducation, a-t-elle ajouté, notant que 130 millions de filles dans le monde ne sont pas scolarisées, pointant la situation particulière de l’Afghanistan.
« Les femmes afghanes doivent jouer pleinement leur rôle dans la construction de l’avenir de leur pays, et leur pays a besoin de ses femmes et de ses filles pour s’épanouir. Les restrictions sévères imposées par les Talibans et le déni des droits divinement accordés doivent être traités de toute urgence », a déclaré Mme Mohammed.
Autonomisation économique et justice
Abordant le deuxième front, Mme Mohammed a affirmé que la promotion des opportunités économiques et des droits des femmes et des filles n’est pas seulement une question d’équité ou d’égalité, mais une question de justice, de progrès et de prospérité pour l’ensemble de la société.
Lorsque des millions de femmes et de jeunes filles sont empêchées de contribuer à leur communauté et à l’économie, « les droits des femmes sont bafoués, comme c’est le cas en Afghanistan aujourd’hui » et « nous sommes tous perdants ».
Mme Mohammed a toutefois relevé des signes d’espoir dans le monde islamique, où des pays démontrent la compatibilité entre les principes islamiques et l’émancipation des femmes.
Honorer la tradition, accueillir le changement
Citant des pays tels que l’Arabie saoudite, le Qatar, l’Égypte, les Émirats arabes unis, l’Indonésie et le Sénégal, elle a déclaré que « les femmes musulmanes érudites, médecins, cheffes d’entreprise et dirigeantes politiques tracent une voie vers l’avenir, enracinée dans la tradition mais accueillent le progrès et le changement ».
Elle a souligné la nécessité de promouvoir le leadership des femmes, en particulier dans la résolution des conflits, la médiation et le maintien de la paix.
Les femmes, la paix et la sécurité
« Nous savons que les processus de paix, y compris la médiation, de la maison au champ de bataille, qui impliquent les femmes, aboutissent à des résultats de paix plus durables », a-t-elle déclaré. « Ici aussi, il ne s’agit pas de faire une faveur aux femmes, mais d’assurer les conditions nécessaires à la mise en place de communautés inclusives, pacifiques et prospères ».
Mme Mohammed a souligné que, contrairement au stéréotype selon lequel les sociétés musulmanes sont statiques et immuables, l’histoire montre un changement incessant et une transformation dynamique.
Amplifier la voix des femmes
Par exemple, les juristes musulmans se sont montrés ouverts à la recherche d’interprétations de la loi islamique compatibles avec l’évolution des circonstances et des valeurs, tandis que les États musulmans ont réformé leurs lois pour permettre une plus grande participation des femmes à la vie économique et politique.
Elle a déclaré que ce processus devait être intensifié et encouragé.
« Je vous invite tous à écouter et à amplifier les voix des femmes dans nos sociétés, en particulier celles de nos sœurs en Afghanistan », a-t-elle dit. « Ensemble, corrigeons la fausse impression et l’ignorance selon lesquelles le fait de priver les filles et les femmes d’éducation et d’opportunités est conforme à notre foi islamique ».
Source:news.un.org