« Dans le monde entier, les femmes et les filles sont représentées de manière disproportionnée parmi les personnes vivant dans la pauvreté », a alerté jeudi 22 juin 2023 une experte indépendante des Nations Unies, relevant que la pandémie de Covid-19 et d’autres crises ont entraîné la première hausse des inégalités de revenus entre les pays, les femmes et les filles étant particulièrement touchées dans de nombreux pays et régions.
Le rapport thématique du groupe de travail sur la discrimination à l’égard des femmes et des filles, présenté devant le Conseil des droits de l’homme, démontre que la pauvreté et les inégalités socio-économiques sont le résultat de défaillances systémiques flagrantes qui entraînent un cercle vicieux d’exclusion et de discrimination.
Au cours des consultations organisées pour préparer ce rapport, les participants – dont plusieurs étaient des femmes et des filles ayant elles-mêmes connu la pauvreté – ont décrit la stigmatisation et les discriminations croisées subies par les femmes et les filles en situation de pauvreté. Ils ont décrit les différentes façons dont la pauvreté et les inégalités ont façonné leur vie.
« De nombreuses participantes ont témoigné avec force du stress engendré par la nécessité d’assurer un niveau de vie adéquat à leur famille, avec des ressources limitées, ainsi que des sentiments de culpabilité liés à l’obligation de laisser leurs enfants pour travailler de longues heures dans des emplois mal rémunérés, informels et précaires », a déclaré Dorothy Estrada-Tanck, Présidente du Groupe de travail sur la discrimination à l’égard des femmes et des filles.
Pour une économie féministe fondée sur les droits humains
D’une manière générale, l’inégalité et la pauvreté des femmes et des filles sont le résultat de choix historiques et continus en matière de politique économique aux niveaux mondial, régional et national. « Ces priorités politiques ne sont pas neutres du point de vue du genre, car elles ont été élaborées dans le cadre de systèmes patriarcaux qui ignorent les expériences et les droits spécifiques des filles et des femmes, tout en privilégiant les formes dominantes de pouvoir des hommes et des entreprises qui perpétuent les hiérarchies existantes », a ajouté Mme Estrada-Tanck.
Le rapport appelle donc à une économie féministe fondée sur les droits de l’homme, qui permette et construise l’égalité réelle, la solidarité et la justice socio-économique et environnementale. « Étant donné que l’échéance des objectifs du développement durable à l’horizon 2030 approche rapidement, il est essentiel de réaffirmer le caractère central des droits humains des femmes et des filles et de l’égalité des sexes dans les processus d’éradication de la pauvreté et de lutte contre les inégalités au sein des nations et entre elles. », a-t-elle fait valoir
Plus globalement, dans de nombreuses juridictions, les lois pénales sont appliquées de manière disproportionnée aux femmes et aux filles en raison de leur statut économique ou social et des coûts d’accès au système judiciaire formel. Les personnes particulièrement touchées sont les femmes vivant dans la pauvreté qui recherchent des soins, y compris l’avortement.
Il s’agit notamment des femmes autochtones, des migrantes et femmes issues de minorités ethniques, les sans domicile fixe, les travailleuses du sexe, celles qui consomment de la drogue ou sont associées au commerce de la drogue, les femmes de l’économie informelle, les commerçants informels et transfrontaliers, les femmes et les filles défenseurs de l’environnement et des droits de l’homme, ainsi que les membres des communautés LGBTIQ+.
L’interaction des inégalités entre les sexes et des taux de pauvreté accroît la vulnérabilité des filles
Le rapport met en également en exergue la sécurité d’occupation des terres ou des logements, qui sont également très limitées pour les femmes vivant dans la pauvreté. « Les femmes et les filles confrontées au harcèlement sexuel au travail, à la violence domestique ou à la violence dans la rue sont incapables de participer sur un pied d’égalité au marché du travail », a-t-elle conclu, rappelant qu’avec une telle vulnérabilité, elles sont plus susceptibles d’être confrontées à la pauvreté, à la violence et à l’absence de domicile fixe lorsqu’elles sont âgées.
Lors des débats, le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) a indiqué qu’environ 1 milliard d’enfants sont pauvres de manière multidimensionnelle, et 100 millions d’enfants supplémentaires sont appauvris en raison de la Covid-19, du changement climatique et des conflits. Dans ces conditions, les enfants sont deux fois plus susceptibles d’être pauvres que les adultes, une réalité aggravée par la féminisation de la pauvreté, comme l’a noté le groupe de travail.
Pour l’UNICEF, l’interaction des inégalités entre les sexes et des taux de pauvreté accroît la vulnérabilité des filles à l’abandon scolaire, à la violence et à l’exploitation sexuelles, au mariage forcé et au mariage d’enfants, ainsi qu’à la traite des êtres humains. Les adolescentes, en particulier, sont exposées de manière disproportionnée à la violence des partenaires intimes, aux grossesses précoces et aux parcours économiques contrariés – des risques qui sont exacerbés par les conflits et le changement climatique.
Source:news.un.rog