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A l’occasion de la Journée internationale de la sage-femme, l’agence des Nations Unies chargée des questions de santé sexuelle et reproductive, l’UNFPA, a rappelé vendredi 05 mai que le facteur le plus important pour mettre fin aux décès maternels et néonatals évitables est l’accès aux sages-femmes.

Il manque pourtant 900.000 de ces prestataires de services essentiels dans le monde, note l’agence onusienne, qui appelle à de la volonté politique pour élargir les rangs et le champ d’action des sages-femmes dans le monde.

Elle affirme que remédier à ce déficit permettrait d’éviter deux tiers des décès maternels et néonatals, sauvant ainsi plus de 4,3 millions de vies par an d’ici à 2035.

« Nous travaillons toute la journée, tous les jours »

Au Soudan, confronté à un violent conflit, les sages-femmes jouent ainsi un rôle crucial.

« Nous travaillons toute la journée, tous les jours, dans trois hôpitaux. Pour les femmes et les filles qui n’ont pas de moyen de transport, nous nous rendons à leur domicile pour nous assurer qu’elles accouchent en toute sécurité », a raconté à l’UNFPA Insaf, une sage-femme qui travaille actuellement à Om Badda, un district de la capitale du Soudan, Khartoum.

Deux semaines de combats brutaux entre l’armée soudanaise et les forces paramilitaires de soutien rapide ont transformé Khartoum, l’épicentre de la violence, en zone de guerre et plongé le pays dans la tourmente.

Plus de 500 personnes ont été tuées et des centaines de milliers ont été forcées de quitter leur foyer, soit à l’intérieur du pays, soit en traversant les frontières vers la République centrafricaine, le Tchad, l’Égypte, l’Éthiopie et le Soudan du Sud.

Beaucoup de ces personnes ont déjà été déplacées à plusieurs reprises en raison de l’instabilité politique, de la faim et des crises climatiques, et un nombre incalculable d’entre elles se réfugient dans des camps de fortune peu sûrs, surpeuplés et insalubres.

24.000 femmes doivent accoucher dans les semaines à venir

À Khartoum, seul un établissement de santé sur quatre est pleinement opérationnel, la plupart des établissements endommagés ne fonctionnant que partiellement, ce qui prive des millions de personnes d’un accès à des soins essentiels.

Des dizaines d’attaques contre les hôpitaux, le personnel soignant et les ambulances, ainsi que le pillage généralisé des fournitures médicales, de l’eau, du carburant et de l’électricité, déjà rares, ont mis le secteur de la santé au bord de l’effondrement.

Pour les femmes et les jeunes filles, y compris les 219.000 femmes qui seraient enceintes dans la seule ville de Khartoum, l’absence de services de santé essentiels peut mettre leur vie en danger. L’accès aux sages-femmes est le facteur le plus important pour mettre fin aux décès maternels et néonatals évitables.

Quelques 24.000 femmes devraient accoucher dans les semaines à venir, dans un contexte de chaos et d’effusion de sang ; il est donc extrêmement dangereux pour elles d’obtenir des soins prénatals essentiels, des services d’accouchement en toute sécurité ou un soutien postnatal, a souligné l’UNFPA.

Seul 1 établissement de santé sur 4 est opérationnel à Khartoum

Alors que le ravitaillement des fournitures et les services s’arrêtent, les grossesses ne s’arrêtent pas.

« Nous manquons cruellement de fournitures à Khartoum, en particulier d’ocytocine et de clips ombilicaux. Bien que les services continuent pour le moment, nous prions pour que des fournitures supplémentaires arrivent bientôt », a déclaré Jamila, une sage-femme travaillant dans un centre de santé soutenu par l’UNFPA à Khartoum.

Le sang, l’oxygène et d’autres produits médicaux de première nécessité, tels que le carburant pour les ambulances, commencent également à manquer dangereusement.

Malgré les circonstances catastrophiques, les hôpitaux et les centres de santé qui fonctionnent encore – et qui restent debout – s’avèrent être une bouée de sauvetage pour les femmes enceintes et les nouvelles mères.

Des numéros de téléphone pour les demandes d’accouchement à domicile

 Nous avons désigné des numéros de téléphone pour recevoir les demandes d’accouchement à domicile, et une sage-femme se rend sur place pour pratiquer l’accouchement

Là où l’accès est compromis, les sages-femmes communautaires et les accoucheuses qualifiées formées par l’UNFPA aident les femmes enceintes à accoucher dans la sécurité de leur foyer.

Les combats incessants dans le village de Jabal Awliya, dans l’État de Khartoum, ont gravement affecté les soins de santé reproductive.

« Nous avons désigné des numéros de téléphone pour recevoir les demandes d’accouchement à domicile, et une sage-femme se rend sur place pour pratiquer l’accouchement. Nous sommes en mesure d’accepter toutes les demandes pour le moment », a déclaré Saadya, une sage-femme travaillant à Jabal Awliya.

Toutefois, avec la poursuite des frappes sur les infrastructures, les lignes électriques risquent d’être coupées et même ces lignes téléphoniques d’urgence pour les personnes en grande difficulté.

Quelques 90 sages-femmes communautaires formées par l’UNFPA aident actuellement les femmes et les jeunes filles enceintes à accoucher en toute sécurité, principalement à domicile, dans les zones de Kalakla, Jabal, Naser et Al Azhari à Khartoum.

Au cours des deux dernières années, l’UNFPA a formé 460 sages-femmes qui atteignent les communautés les plus reculées, y compris lors de crises humanitaires, en établissant un climat de confiance et en fournissant des services de santé maternelle de haute qualité.

Dévouement

La Directrice régionale de l’UNFPA, Laila Baker, a partagé son extrême préoccupation quant aux conditions périlleuses auxquelles sont confrontées les femmes enceintes à Khartoum.

« Il n’y a aucun moyen de les surveiller, il n’y a aucun accès à des services d’accouchement sûrs, aucun moyen d’assurer ne serait-ce qu’une maigre communication », a dit Mme Baker, ajoutant que « les femmes peuvent accoucher prématurément et la panique peut entraîner des complications. Les circonstances sont tellement précaires ».

Des réfugiés fuyant le conflit au Soudan se reposent dans le village de Koufroun, dans le Tchad voisin.
© UNICEF/Donaig Le Du
Des réfugiés fuyant le conflit au Soudan se reposent dans le village de Koufroun, dans le Tchad voisin.

Des rapports alarmants font également état d’une recrudescence des formes de violence sexiste : à savoir les violences sexuelles à l’encontre des femmes et des filles fuyant les combats, les violences domestiques alimentées par les restrictions de mouvement et les tensions, et des femmes et filles prises pour cible lorsqu’elles sortent pour s’approvisionner.

En réponse aux risques croissants pour quelque 3,1 millions de femmes et de filles qui étaient déjà exposées à la violence avant la crise actuelle, des efforts sont en cours pour former les prestataires de services à fournir un soutien psychosocial à distance.

Avant la crise actuelle, l’UNFPA a distribué des fournitures pour plus de 19.000 accouchements sans risque et des fournitures pour répondre aux besoins de santé reproductive de plus de 45.000 personnes, notamment pour la gestion clinique des viols et le traitement des infections sexuellement transmissibles.

Les partenaires de l’UNFPA veillent actuellement à ce que ces fournitures parviennent aux établissements de santé et aux hôpitaux qui fonctionnent encore au Soudan.

Le Soudan était déjà l’un des pays les plus pauvres du monde avant que le conflit n’éclate, un tiers de la population ayant besoin d’une aide humanitaire et étant confronté à une famine aiguë.

L’UNFPA rappelle que les violences et les attaques récentes contre les centres de santé constituent une violation du droit international et du droit international humanitaire et du droit à la santé.

« Alors que la situation atteint son point de rupture, et malgré les risques croissants, l’UNFPA continuera à favoriser les accouchements en toute sécurité, à chercher à protéger les femmes et les filles vulnérables et à aider les sages-femmes à sauver des vies », a fait valoir l’agence onusienne.

source:news.un.org