Le climat sécuritaire reste tendu dans le nord et l’est du Burkina Faso en raison des attaques terroristes.
Fait assez rare, à Fada Ngourma, des femmes auraient participé à l’enlèvement, mercredi, de six personnes au marché de Baléré et Diabo. Le rôle des femmes au sein des groupes djihadistes reste mal documenté mais il semble que celles-ci, rarement impliquées dans les combats, participent à l’implantation locale des groupes djihadistes.
La ruse des djihadistes
Selon des témoins que la DW a pu joindre sur place, plusieurs individus armés – environ 150 personnes dont six femmes – ont attaqué le marché de Balaré. Certaines femmes auraient été reconnues par les marchands du marché. Celles-ci avaient été en effet aperçues 24 heures avant l’attaque perpétrée, mercredi, vers 16 heures, heure locale.
Huit otages, tous des hommes, ont été enlevés. Toujours selon les mêmes témoins, les djihadistes auraient ensuite libéré une personne âgée et un aveugle.
Haro Illas vit à Fada Gourma. Il est surpris par la participation active des femmes à ces enlèvements qui ont poussé la population à fuir vers la commune de Diabo qui compte 64 villages et une dizaine de hameaux de culture.
Selon lui, « c’est quand même assez courageux que les femmes soient à la tête de ça. La veille des faits, ces femmes sont arrivées déguisées en mendiantes pour venir dans le marché. Pourtant c’était pour préparer le terrain et revenir le lendemain. Voilà ce qu’on a comme information de la part des riverains. »
L’utilisation des femmes dans le djihadisme terroriste
Au Sahel et dans le bassin du Lac Tchad, l’implication des femmes dans les activités djihadistes n’est pourtant pas un phénomène nouveau. Elle tire notamment son origine du Nigeria, où le groupe islamiste Boko Haram a utilisé des femmes pour faire des attentats suicides.
Au Mali, le phénomène est apparu à partir de 2013, avec des femmes intégrées dans les actions du groupe Ansar Dine.
« Au Mali on a vu effectivement la présence de femmes qui étaient cuisinières pour les djihadistes mais pas de femmes en première ligne en train de combattre dans le camp malien pendant l’occupation. Maintenant certaines disent avoir été recrutées par la force, d’autres disent avoir été mariées à des combattants djihadistes et avoir réussi à s’enfuir, et d’autres disent avoir épousé de façon volontaire l’idéologie djihadiste et avoir adhéré en toute liberté » , explique l’activiste malien Abdoulaye Guido.
Un phénomène nouveau au Burkina Faso
Le phénomène est toutefois nouveau au Burkina Faso. Mais selon Abdoulaye Sounaye spécialiste du Sahel, pour des raisons d’appartenance identitaire, le djihadisme peut séduire certaines femmes.
« Il est certainement nouveau mais il peut aussi avoir des racines sociales, des volontés d’affirmation de tel groupe appartenant à telle communauté. Donc si on regarde les choses de cette façon on peut comprendre comment le djihadisme peut être attrayant pour certaines femmes », précise Abdoulaye Sounaye, expert affilié au Leibniz Zentrum Moderner Orient de Berlin, enseignant chercheur à l’Université Abdou Moumouni et au Lasdel de Niamey.
Selon une étude menée par l’Institut d’études de sécurité (ISS), qui a mené des entretiens avec des femmes associées à Boko Haram dans la région de Diffa au Niger, et à la Katiba Macina, dans les régions de Mopti et Ségou au Mali, celles-ci participeraient surtout à assurer le ravitaillement des groupes armés et faciliteraient aussi leur implantation au sein des communautés. Elles contribueraient donc activement à la conduite de leurs opérations.
Source : allafrica