Juste avant midi à Satara, un village reculé de la région de Tillaberi, dans le sud-ouest du Niger, le thermomètre avoisine déjà les 40°C.
La route non goudronnée qui mène au village est cahoteuse et sablonneuse. Pour les habitants du village, le chemin et la chaleur intense font partie de la vie quotidienne.
Les températures élevées n’ont pas empêché Foureyratou Saidou, mère célibataire de quatre enfants et veuve depuis peu, de s’occuper du jardin communautaire situé à proximité du village. Les bénéfices en valent la peine, dit-elle.
« Dans ce jardin, nous cultivons et récoltons des oignons, des tomates, de la laitue et d’autres légumes que nous mangeons et que nous pouvons vendre sur le marché local », explique-t-elle. « Avant, nous n’avions pas grand-chose pour vivre. Maintenant, nous en avons, et nous ne voulons pas partir ».
Mme Saidou fait partie des milliers d’agricultreurs qui bénéficient du programme intégré de résilience du Programme alimentaire mondial (PAM), lancé il y a près de dix ans au Niger et dans quatre autres pays du Sahel – le Burkina Faso, le Tchad, le Mali et la Mauritanie.
En quête d’espoir
Elle fait également partie des millions d’agricultrices à travers le monde qui reprennent espoir à l’approche de la Journée mondiale de lutte contre la désertification et la sécheresse, célébrée le 17 juin. Son jardin de feuilles représente un pas vers la culture de la terre pour en faire un moyen de subsistance.
Soutenant les priorités nationales du gouvernement nigérien et en partenariat avec de multiples partenaires des Nations Unies et non gouvernementaux, l’initiative du PAM couvre des domaines tels que la réhabilitation des terres, la diversification des moyens de subsistance, les repas scolaires, les interventions nutritionnelles et l’amélioration de la production agricole et de l’accès aux marchés.
À ce jour, l’initiative aide 3 millions de personnes dans la région du Sahel, dont 1,8 million dans 2.000 villages du Niger l’année dernière, à mieux se préparer et à se remettre d’une myriade de chocs interconnectés, notamment le changement climatique, la dégradation des sols, la flambée des prix et les conflits.
Renverser la situation
Dans les régions gravement touchées par la crise alimentaire actuelle, 80 % des villages bénéficiant des activités de résilience du PAM n’ont pas eu besoin d’aide humanitaire en 2022. Cela représente environ 500.000 personnes qui n’ont pas eu besoin d’aide d’urgence, soit environ 30 millions de dollars d’économies, indique l’agence des Nations Unies.
Mis en œuvre dans l’ensemble du pays, les programmes encouragent également la participation et l’autonomisation des femmes, en mettant l’accent sur les zones où l’insécurité alimentaire est la plus forte et qui ont tendance à être confrontées à des conflits ou à accueillir de grandes concentrations de personnes déplacées, ce qui intensifie la demande de ressources rares.
Les initiatives comprennent la réhabilitation des terres, à l’aide de techniques innovantes telles que le creusement en forme de demi-lune qui ralentit et capte l’écoulement de l’eau de pluie, ce qui contribue à améliorer la croissance des plantes.
Jusqu’à présent, plus de 233.000 hectares ont été réhabilités depuis le lancement de l’initiative en 2014, et le PAM prévoit maintenant de s’étendre à de nouvelles zones et d’équiper davantage de personnes avec les outils dont elles ont besoin.
Des outils pour prospérer
Ces efforts sont essentiels, car les conclusions d’experts récemment publiées montrent que l’insécurité alimentaire aiguë au Sahel devrait atteindre son niveau le plus élevé depuis dix ans d’ici juin, a indiqué l’agence. Au Niger, les experts prévoient que 3,3 millions de personnes souffriront de la faim pendant la période de soudure de juin à août, contre 2,5 millions aujourd’hui.
« Pour inverser ces chiffres, il faut non seulement des actions à court terme, mais surtout que les acteurs s’unissent pour mettre en œuvre des solutions plus durables et transformatrices à une échelle significative », a déclaré Jean-Noël Gentile, directeur national du PAM pour le Niger. « Grâce à nos projets intégrés de résilience, le PAM, le gouvernement et les partenaires donnent aux populations vulnérables les moyens de disposer des outils dont elles ont besoin pour prospérer ».
Tout commence par la terre
Le PAM a intensifié ses activités de résilience au Niger, après avoir constaté qu’elles avaient permis de restaurer les ressources naturelles, d’augmenter les revenus agricoles, de réduire les migrations et les conflits liés à la rareté des ressources, et d’améliorer l’éducation et la nutrition.
« Tout commence par la terre », déclare Volli Carucci, qui dirige le programme de résilience du PAM. « Sans terres productives, il n’y a pas de production alimentaire. La terre est le point de départ de systèmes alimentaires résilients, sur lesquels les communautés peuvent compter ».
C’est le cas à Satara, où une initiative de jardinage communautaire soutenue par le PAM a transformé des terres autrefois stériles.
Des raisons pour rester
Mme Saidou est maintenant membre d’une coopérative villageoise qui vend sur le marché local les excédents du jardin, au-delà de ce que les membres conservent pour nourrir leurs familles.
Les bénéfices sont réinvestis dans des investissements au niveau du village afin d’améliorer la productivité des terres, indique l’agence alimentaire des Nations Unies. Il s’agit également d’un des nombreux exemples où le PAM améliore les liens entre les agriculteurs et les marchés et accroît leurs bénéfices et l’accès général à la nourriture.
Alors que de nombreux hommes ont quitté des villages comme Satara à la recherche d’un emploi, Mme Saidou voit maintenant des raisons de rester.
« Je travaille pour la santé de mes enfants et pour leur donner la possibilité d’étudier et de rester dans notre village », dit-elle. « Je veux que le jardin s’agrandisse, pour que nous ayons plus à vendre et plus de revenus à investir dans la famille et dans la communauté ».
Un modèle pour la communauté
Autour du village de Gaffati, dans le sud-est du Niger, quelque 300 personnes participent à un projet de reboisement soutenu par le PAM qui voit pousser des acacias, des arbustes indigènes et des herbes pour le fourrage dans une région rendue stérile par la sécheresse saisonnière, les inondations, le surpâturage et d’autres pratiques néfastes.
« Je suis déterminée à enseigner à d’autres femmes tout ce que j’ai appris ces dernières années sur la façon de préparer des repas sains et nutritifs pour nourrir nos enfants, et sur la façon de prendre soin de nous en tant que mères », déclare Alia Issaka, 40 ans, mère célibataire de huit enfants, qui participe à un programme de nutrition communautaire.
« Il n’est pas facile d’être un modèle pour la communauté », ajoute Mme Issaka, qui dirige également une association locale de femmes. « Mais je me sens investie d’une responsabilité, afin que davantage de femmes puissent participer à la prise de décision et à l’amélioration de la santé de leur famille ».
Source:news.un.org