Environ 1,2 milliard de personnes vivent dans une situation de pauvreté aigue, selon le nouvel indice de pauvreté multidimensionnelle présenté aujourd’hui par le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) et par l’Initiative sur la pauvreté et le développement humain de l’Université d’Oxford.
Leurs données mettent aussi en lumière les « faisceaux de privations » en électricité, en éducation, en services de santé ou d’assainissement, qui freinent les politiques de développement.
Ce nouvel instrument de mesure de la pauvreté ne prend plus seulement en compte le revenu. Il observe aussi les différentes facettes de la pauvreté dans la vie quotidienne, comme l’accès à l’éducation et à la santé, le logement, l’eau potable, l’accès à l’électricité et à l’assainissement.
Avant même la pandémie et la montée actuelle de l’inflation due à la guerre en Ukraine, cet indice montrait que 1,2 milliard de personnes, dans 111 pays en développement vivaient déjà en situation de pauvreté multidimensionnelle extrême, un chiffre deux fois supérieur aux estimations antérieures basées uniquement sur le revenu et sur le seuil de pauvreté monétaire officiel établi à 1,90 dollar par jour.
Ces « faisceaux de privation » multiples sont interconnectés et leur analyse permet de déterminer les profils de la pauvreté dans des zones précises, et d’aider à concevoir des stratégies de développement qui s’attaquent simultanément à plusieurs problèmes et montrent ainsi une plus grande efficacité.
« Avec la menace d’une récession à l’horizon et une dette qui accable 54 pays en développement, nous constatons que les budgets gouvernementaux déjà limités, deviennent de plus en plus serrés », confie Achim Steiner, Administrateur du PNUD. « C’est pourquoi il est essentiel d’utiliser la puissance des données et des analyses fines pour apprendre à tirer le meilleur parti de ressources de plus en plus rares ».
Cette nouvelle analyse multidimensionnelle montre ainsi par exemple que la décarbonation et l’élargissement de l’accès aux énergies propres sont non seulement bénéfiques pour l’action climatique, mais aussi essentielles pour près de 600 millions de personnes en situation de pauvreté multidimensionnelle qui n’ont toujours pas accès à l’électricité et aux combustibles de cuisson non polluants.
De meilleures données pour des stratégies plus efficaces
De même, ce nouveau prisme met en lumière les schémas récurrents de pauvreté et permet de déterminer les moyens d’action les plus efficaces. Tasneem Mirza, l’une des auteurs du rapport du PNUD, cite l’exemple de certains villages au Laos, où les familles ne disposent pas de combustibles de cuisson et ne peuvent donc envoyer leurs enfants à l’école, car ces derniers doivent tous les jours aller ramasser du bois de chauffe. « Construire une école de village ne suffira sans doute pas si la question du combustible n’est pas réglée d’abord », explique-t-elle.
Sur la base des dernières données disponibles, recueillies en grande partie avant le début de la pandémie de COVID-19, le rapport souligne la nécessité de s’attaquer à des niveaux de privations qui sont étroitement associés.
Ainsi, plus de 50% des pauvres (593 millions) manquent à la fois d’électricité et de combustibles de cuisson non polluants, près de 40% des pauvres (437 millions) n’ont accès ni à l’eau potable ni à l’assainissement et plus de 30% d’entre eux (374 millions) sont privés simultanément de nutrition, de combustibles de cuisson, d’assainissement et de logement.
Les politiques intégrées ont déjà démontré leur potentiel
D’où la nécessité de politiques intégrées, sources de succès déjà visibles avant la pandémie, comme au Népal, où l’investissement dans l’assainissement a eu un effet positif en chaine sur l’accès à l’eau potable, la nutrition des enfants et la baisse de la mortalité infantile. En Inde, en 15 ans, près de 415 millions de personnes sort sorties de leur situation de pauvreté multidimensionnelle, un changement historique.
Pourtant, alors qu’avant les ravages du Covid 72 pays avaient considérablement réduit la pauvreté, les nouvelles crises interconnectées semblent avoir compromis les efforts visant à éradiquer la pauvreté conformément aux objectifs de développement durable. Le rapport insiste donc sur la nécessité de reprendre les mises à jour de données en particulier dans les pays à faibles revenus et dans les zones où vivent les personnes les plus vulnérables.
Les analyses régionales doivent ainsi être approfondies. Mais elles montrent déjà que la grande majorité des personnes victimes de pauvreté multidimensionnelle vivent en Afrique subsaharienne (83%, soit 579 millions de personnes) et en Asie du Sud (385 millions). Les deux tiers d’entre eux se trouvent dans des pays à revenus intermédiaires et pour 83% dans des zones rurales. Malgré ses progrès impressionnants avant la pandémie, l’Inde comptait toujours 229 millions de pauvres, suivie par le Nigéria avec 97 millions.
« Cet indice sera essentiel pour éclairer les efforts du PNUD dans le monde et sa collaboration avec nos partenaires de l’ONU, mais aussi pour atteindre notre objectif audacieux d’aider 100 millions de personnes à sortir de la pauvreté multidimensionnelle d’ici 2025 », a assuré Achim Steiner.
Source:news.un.org