Bien que le pays ait ratifié le protocole de Maputo sur les droits des femmes et des filles dès 2005, des parlementaires et des religieux arguent du respect des coutumes pour lever l’interdiction.
L’Assemblée nationale de Gambie a commencé, lundi 4 mars, l’examen d’un texte de loi levant l’interdiction des mutilations génitales féminines, en vigueur depuis 2015.
Le parlementaire Almameh Gibba a introduit la proposition de loi en première lecture. L’examen a été renvoyé à une seconde lecture prévue le 18 mars. Les perspectives d’adoption et d’application sont incertaines.
L’éventualité d’un retour à la légalisation des mutilations génitales féminines (MGF) divise l’opinion gambienne depuis des mois. Quelques dizaines de femmes et d’hommes ont manifesté à l’extérieur et à l’intérieur du Parlement pour la levée de l’interdiction. Ils ont fait valoir l’argument communément brandi selon lequel ce qu’ils nomment « circoncision féminine » est une tradition profondément enracinée et que l’interdire enfreint leur droit à pratiquer leurs coutumes.
Au contraire, de nombreuses organisations de la société civile pressent le gouvernement de rester ferme. L’Unicef rappelait dans un rapport en 2021 que 76 % des Gambiennes de 15 ans à 49 ans avaient subi des mutilations génitales et 75 % des Gambiennes de 15 ans à 19 ans.
L’ancien dictateur Yahya Jammeh, aujourd’hui en exil, avait instauré par décret l’interdiction de l’excision en 2015 dans le droit gambien en assurant qu’elle n’était pas prescrite par l’islam. La quasi-totalité de la population est musulmane.
Le Parlement avait adopté la même année le premier texte interdisant spécifiquement les MGF, désormais punies par des peines allant jusqu’à trois ans de prison. Entre 2018 et 2021, une seule affaire de mutilations génitales a été portée devant un tribunal et aucune condamnation ni sanction n’a été prononcée, écrivait l’Unicef dans son rapport.
Graves conséquences pour la santé des femmes
La querelle s’est avivée à la mi-2023 avec la condamnation de trois femmes à des amendes ou à des peines de prison. Un chef religieux a payé les amendes.
Le Conseil islamique suprême (CIS) a publié une fatwa (avis) affirmant la légalité de la « circoncision féminine » au regard de l’islam et disant qu’elle n’est pas seulement une coutume ancestrale, mais aussi « une des vertus de l’islam ». Le CIS, principale organisation musulmane du pays, demandait au gouvernement de reconsidérer l’interdiction.
L’Unicef caractérise les mutilations génitales féminines par l’ablation partielle ou totale pour des raisons non médicales des organes génitaux externes (clitoris, grandes et petites lèvres, parfois avec infibulation). Elles constituent une violation des droits fondamentaux des filles et des femmes, reconnus par l’Union africaine par signature en 2005 du protocole de Maputo, que la Gambie avait ratifié la même année. L’Unicef chiffre à 200 millions le nombre de filles et de femmes victimes de ces mutilations dans le monde.
« En tant que gens responsables, nous veillerons à ce que l’amendement proposé ne passe pas », a assuré le vice-président de l’Assemblée, Seedy Njie, dans le journal Standard. Il a cependant suggéré qu’on suspende les poursuites contre les auteurs de mutilations génitales le temps que soient menées des campagnes de sensibilisation efficaces.
Les femmes endurent, en effet, de graves complications physiologiques et développent des pathologies aussi bien physiques que mentales durant toute leur vie en raison de ces mutilations. Quant aux fillettes qui en sont victimes, certaines meurent durant l’opération réalisée le plus souvent dans des conditions d’hygiène déplorables. Des conséquences peu évoquées lors des débats au sein des communautés.
« En tant que gens responsables, nous veillerons à ce que l’amendement proposé ne passe pas », a assuré le vice-président de l’Assemblée, Seedy Njie, dans le journal Standard. Il a cependant suggéré qu’on suspende les poursuites contre les auteurs de mutilations génitales le temps que soient menées des campagnes de sensibilisation efficaces.
Les femmes endurent, en effet, de graves complications physiologiques et développent des pathologies aussi bien physiques que mentales durant toute leur vie en raison de ces mutilations. Quant aux fillettes qui en sont victimes, certaines meurent durant l’opération réalisée le plus souvent dans des conditions d’hygiène déplorables. Des conséquences peu évoquées lors des débats au sein des communautés.
Source:https://www.lemonde.fr/afrique/article/2024/03/05/en-gambie-le-parlement-examine-un-texte-legalisant-a-nouveau-l-excision_6220221_3212.html